Tiré de : «  La France pittoresque du midi » par Alexis M.G.- 1900 -

BASSES-ALPES

5 ARRONDISSEMENTS, 30 CANTONS, 250 COMMUNES, 118140 HABITANTS

Géographie. — Le département des Basses-Alpes est ainsi nommé de ce que ses monts alpins, bien que très hauts, le sont moins que ceux du Dauphiné. Formé d'une portion de la Haute-Provence , il a une super­ficie de 6987 kilomètres carrés, ce qui le place au 23 e rang sous ce rapport.

Sauf la partie sud-ouest, le territoire est entièrement couvert par les Alpes, dont les plus hauts sommets, de nature crétacée ou schisteuse, s'élèvent au nord-est; tels sont : le Parpaillon, 2296 mètres ; le Grand-Bérard, 3048 mètres ; puis, sur la frontière d'Italie, la Tête-de -Moyse, 3110 mètres , et l'Aiguille de Chambeyron, 3400 mètres , point culmi­nant, au nord de Larche. C'est aussi dans cette région que se trouve la célèbre vallée de Barcelonnette ou de l'Ubaye, avec ses monts revêtus de pâturages ou de sombres forêts de sapins, et ses pics couronnés de neiges perpétuelles. Son bassin est limité au sud par la montagne de la Blanche , avec le pic des Trois-Évêques, et par d'autres « Alpes de Provence » détachées du massif de l'Enchastraye, sur la frontière italienne. Plusieurs cols franchissent ici ladite frontière, notamment les cols de Longet, de Lautaret et de Larche ou de l'Argentière ; ce dernier, que suivit l'armée de François 1 er en 1515, est aujourd'hui muni d'une route carrossable qui relie Barcelonnette à Suze.

La montagne de Lure, 1827 mètres , et l'éperon oriental de celle du Lubéron, 786 mètres , font partie des chaînes calcaires du département, qui n'atteignent pas les altitudes des précédentes : les plus hauts som­mets entre les vallées de la Durance et de la Bléonne n'ont que 2191 mètres (Blayun, entre le Bès et la Bléonne ), 2116 mètres (Menges, entre le Bès, le Vançon et la Sasse ). Ces chaînes sont presque toujours blanches de neige en hiver, brûlées en été par des soleils torrides, battues par le vent du nord et par le sirocco (sud-est), gercées de vallées de pierres, de ravins d'érosion, de gorges où s'engouffre une chaleur étouf­fante, et où l'on meurt de soif sur le bord sans ombre des torrents : triste résultat d'un déboisement inconsidéré.

La mort de la montagne. —A la suite de l'enquête agricole de 1866, le conseiller d'État chargé de l'étude de la région du Sud-Est de la France décrit ainsi qu'il suit le département des Basses-Alpes, dans un rapport dressé en 1868 :

« Ce qui frappe tout d'abord, quand on parcourt les parties monta­gneuses du département des Basses-Alpes, c'est l'aspect imposant, mais triste et désolé, qu'elles présentent. A la place des grandes forêts ou des riches pâturages qui, suivant la tradition locale, les couvraient autrefois, elles ne montrent plus que des cimes dénudées, des pentes arides, où quelques broussailles retiennent encore le peu de terre végétale que les eaux n'ont pas entraînée, et des ravins profonds où les torrents ont roulé d'énormes avalanches de roches et de graviers. Çà et là, et comme perdues au milieu de ces dévastations, on aperçoit, à des hauteurs ou sur des pentes qui souvent paraissent inaccessibles, de pauvres habitations, les unes abandonnées, les autres, restes misérables de quelque exploitation plus importante, que des défrichements inintelligents ont voulu accroître, et dont les éboulements ont successivement emporté des lambeaux. De loin en loin on rencontre quelques villages entourés de petits héritages morcelés, qu'une population rude au travail et à la fatigue a péniblement créés, et qu'elle défend plus péniblement encore contre les orages, les inondations et les autres causes de destruction qui menacent nos Alpes françaises. Puis, à de longs intervalles, apparaissent quelques rares prai­ries, quelques versants boisés, quelques plateaux où croissent de bonnes pâtures et que leur moindre déclivité a sauvés de la ruine commune : ce sont les oasis de ces immenses steppes. Autour d'elles se continue, lente mais incessante, l'œuvre d'appauvrissement commencée depuis plus d'un siècle, c'est-à-dire depuis le moment où une législation respectueuse, trop respectueuse peut-être du droit de propriété, a permis de morceler et de défricher les bois, les pâturages qui étaient autrefois la richesse et la sauvegarde de ces contrées. Chaque année, la couche de terre végétale qui recouvre les hauteurs se déchire et s'amoindrit de plus en plus; chaque année, le lit de gravier du torrent s'élargit et s'élève peu à peu en empiétant sur les terrains fertiles des vallées riveraines; chaque année, quelque pauvre famille voit se restreindre son modeste patrimoine, et l'on ne doit pas s'étonner que, sans cesse menacée dans ses moyens d'existence, la population se décourage et qu'elle émigré pour aller cher­cher ailleurs un bien-être plus facile et un travail plus rémunérateur,

Il est temps qu'un reboisement général arrête la décadence de ces mon­tagnes. En retenant ce qui reste de terre végétale, en favorisant la création d'un nouveau sol, en repeuplant par conséquent le pays, le reboisement aurait une heureuse influence sur le climat général de la contrée, qu'il arracherait à l'alternative des températures extrêmes; l'air y deviendrait plus frais et plus humide, sans qu'on y perdît un rayon de soleil, et les pluies, mieux équilibrées, ne manqueraient pas pendant des mois pour former ensuite en deux heures quelque épouvantable torrent, qui descend comme un déluge de gorge en gorge vers la Durance , entraînant avec lui les dernières terres des vallées.

La sortie de la Durance , par 250 mètres d'altitude, marque le point le plus bas du département, dont l'élévation moyenne est d'environ 1000 mètres . Digne est à 590 mètres , Castellane à 723 mètres , Barcelonnette à 1133 mètres d'altitude.

Les nombreux cours d'eau du territoire sont tous torrentueux et inna­vigables. Sauf le Var, qui écorne le sud-est, ils envoient leurs eaux dans le Rhône par l'intermédiaire de la Durance. En effet, cet immense torrent, qui baigne la place forte de Sisteron, recueille l'Ubaye, venue de Barcelonnette; le Buech, la Bléonne , qui passe à Digne; l'Asse, la Largue et le Verdon, pittoresque torrent de Castellane, le plus long du départe­ment : 170 kilomètres . Le principal lac est celui d 'Allos, nappe de 250 hec­tares sommeillant à 2237 mètres d'altitude.

Climat. Productions. — Le climat du département est extrême­ment varié, suivant l'altitude et l'orientation. Les basses vallées du sud-ouest appartiennent au chaud climat provençal, tandis que les hautes vallées ont six à huit mois d'hiver, et les principaux sommets des neiges perpétuelles, voire même quelques glaciers. La hauteur moyenne des pluies annuelles est de 7 décimètres, mais elle atteint un mètre sur les cimes de l'est.

Vu son sol généralement rocheux, surélevé et dépouillé de terre arable, ce département est des plus pauvres au point de vue agricole. Dans le nord montagneux on cultive un peu d'orge, d'avoine, de seigle, et, dans les parties basses du sud, le mûrier, l'olivier, l'amandier et spé­cialement le prunier, qui donne les célèbres prunes dites brignoles. On récolte aussi beaucoup de truffes et de plantes aromatiques et médicinales; les bois, que l'on travaille à augmenter, couvrent 188000 hectares . Des magnaneries existent notamment dans la vallée de la Durance. Mais la principale ressource du pays consiste dans les pâturages d'été, qui nour­rissent un grand nombre de moutons transhumants. Par contre, il y a fort peu d'animaux de races bovine et chevaline; beaucoup plus nombreux sont les mulets, employés surtout pour les transports à dos. Une école pratique d'agriculture fonctionne à Oraison, près des Mées.

Le département exploite les mines de lignite de Manosque, des carrières de marbre et de gypse, ainsi que les sources minérales de Digne et de Gréoux. On y compte diverses filatures, quelques fabriques de drap et de toile, des tanneries, minoteries, papeteries et chapelleries. La prépa­ration des fruits confits et la distillerie des essences aromatiques sont très importantes.

Les troupeaux transhumants. —

« Ce nom, qui, en Espagne, est appliqué aux mérinos qui désertent chaque été les champs brûlés de l'Estramadure, pour aller chercher sur les montagnes de l'Aragon de frais et verdoyants pâturages, se retrouve dans le département des Bouches-du-Rhône. On compte plus de 300000 bêtes à laine qui émigrent annuelle­ment. Ces voyages donnent une qualité supérieure à leur toison et en augmentent le produit; car on évalue la tonte annuelle d'un mouton transhumant à cinq livres au moins. — Les troupeaux se rendent chaque année dans les départements de la Drôme , de l'Isère, des Hautes et Basses- Alpes. — C'est au commencement du printemps que, fuyant la chaleur du midi, ils vont chercher sur les montagnes un air plus frais, des pâtu­rages plus gras, et un printemps que l'automne seul termine. — Lorsque l'époque du départ arrive, plusieurs propriétaires réunissent leurs trou­peaux au nombre de 6, 8, 10, 12 et même 15000 têtes- — Les sexes, les âges, les espèces sont classés et séparés. La partie la plus faible marche la première, et ainsi successivement jusqu'à la plus forte, qui termine la caravane. Les agneaux de l'année courante restent avec leurs mères jus­qu'à l'arrivée à la montagne. — Le grand troupeau résultant de ce mélange se nomme compagne. Chaque compagne est subdivisée ensuite pour la marche en parties d'une même, espèce de 1000 à 2000 bêtes. Ces parties ou subdivisions se nomment scabois. — Les scabois sont conduits par un berger et gardés par un chien par quatre cents têtes chacun. Ces chiens, d'une espèce particulière et d'une grosseur énorme, peuvent se battre avec avantage contre les loups. Ils ont le cou armé d'un collier de fer hérissé de pointes. Les scabois d'une même compagne se suivent de dis­tance en distance; ils ont chacun à leur tète une vingtaine de boucs dits menons . Ces boucs et les chèvres ouvrent la marche, tracent la route; les bêtes à laine suivent, entraînées par l'instinct qui les attache aux chèvres et par le bruit sourd de grandes sonnettes appendues au cou des boucs. » (âbel hugo, France pittoresque.}

Les habitants. — Le département des Basses-Alpes, dont la popula­tion émigré sans cesse vers la plaine et les grandes villes, ne renfermait en 1896 que 118140 personnes. Sous ce rapport il n'a d'inférieur que le département des Hautes-Alpes, et pour la densité il est tout à fait au dernier rang, avec 17 habitants par kilomètre carré. Aussi est-il en dimi­nution de 16000 âmes sur 1801 et de 21000 sur 1871; les étrangers n'y atteignent pas le chiffre de 3000. Par contre, la population est exclusi­vement catholique, et le français est parlé partout à côté des patois locaux.

Personnages. — Saint Mayeul, abbé de Cluny, né à Valensole, mort en 994. Saint Jean de Matha, fondateur des Trinitaires, né à Faucon, mort en 1213. Le général corse d'Ornano, né à Sisteron, mort en 1626. Le philosophe Gassendi, né à Champtercier, mort en 1656. L 'amiral de Villeneuve, né à Valensole, mort en 1806. L 'orateur parlementaire Manuel, né près de Barcelonnette, mort en 1827. Le général Desmichels et le ministre de Fortoul, nés à Digne, morts en 1845, 1856.

Administrations. — Ce département forme le diocèse de Digne; il ressortit à la cour d'appel et à l'académie d'Aix, à la 15 e division mili­taire (Marseille), à la 12° région agricole (Sud-Est) et à la 26 e conserva­tion forestière (Aix). — II comprend 5 arrondissements : Digne, Barcelon­nette, Castellane, Forcalquier et Sisteron, avec 30 cantons et 250 com­munes.

I. DIGNE,

chef-lieu du département (1), s'élève à 590 mètres d'altitude sur le penchant d'une colline baignée par la Bléonne , et dominée elle-même de tous côtés par de hautes crêtes jaunâtres. Cette ville de 7000 âmes se divise en trois parties appelées, suivant leur hauteur relative, la Tête , le Mitan ou milieu, et le Pied. Elle est généralement mal bâtie; son unique édifice remarquable est la cathédrale actuelle, construite de 1490 à 1500 et précédée d'une façade moderne. Hors ville, se voit l'ancienne église Notre-Dame, qui est rangée au nombre des monuments historiques. On remarque aussi l'agréable promenade formée par le boulevard et le cours Gassendi, avec la statue du célèbre philosophe, qui, né dans les environs, à Champtercier, mourut chanoine prévôt de la cathédrale. — Digne, l'antique Dinia, capitale des Bodiontii, eut, à partir du IV°siècle, un évêché fondé par saint Domnin. Détruite par les Barbares, elle se rebâtit et fut encore saccagée pendant les guerres de religion, puis décimée en 1629 par une peste qui réduisit sa population de 10000 à 1500 habi­tants. Aujourd'hui elle fabrique du drap et fait le commerce d'excellentes prunes dites « brignoles », de fruits secs et confits.

Barrême , sur l'Asse, fabrique aussi du drap et rappelle le souvenir de Napoléon, qui y passa la nuit du 3 au 4 mars 1815.

Le bourg des meés, situé près de la Durance , au pied de montagnes escarpées, est connu pour ses bons vins ordinaires et son élevage de vers à soie. Au sud-ouest se trouve l'important domaine agricole de Pailherols,

 

(1) Arrondissement de digne : » cantons, 83 communes, 40350 habitants.

Cantons et communes principales : 1. Digne, 7880 habitants. — 2. Barrême, 870. — 3. Javie (La), 460. — 4. Mées (Les), 1920; Oraison, 1900. — 5. Mezel, 700. — 6. Moustiers- Sainte -Marie, 1000. — 7. Riez, 1960. — 8. Seyne, 1790. — 9. Valensole, 2620; Gréoux, 1090.

 

jadis ferme-école, où Pasteur appliqua dès le début ses grandes décou­vertes sur la sériciculture, Cette ferme-école est aujourd'hui remplacée par l'école pratique d'agriculture et d'horticulture d' Oraison.

moustiers-sainte-marie , assise à l'issue d'une gorge formée par des rochers abrupts de 150 mètres de hauteur, est une petite ville qui doit son origine et son nom à un monastère de Servîtes, ou Serviteurs de la Mère de Dieu. Aussi fut-elle de bonne heure un lieu de pèlerinage à la sainte Vierge. Un profond vallon la divise en deux parties que relient plusieurs ponts, tandis que les sommets des pics rocheux qui la dominent sont rattachés depuis des siècles par une chaîne en fer portant suspendue en son milieu une étoile dorée. Cette chaîne passe pour l'ex-voto d'un chevalier de Blacas qui, fait prisonnier par les Sarrasins, dut sa déli­vrance à Notre-Dame de Moustiers.

riez , sur un affluent du Verdon, fut primitivement la capitale des Rienses, laquelle devint très florissante sous les Romains, qui l'appelèrent Colonia Augusta Reiorum. De celle dernière époque se voient de nom­breuses antiquités, entre autres six colonnes disposées en hémicycle dans la chapelle Saint-Maxime, et le curieux baptistère, dit Panthéon ou Rotonde, construit dans les premiers siècles chrétiens avec des débris romains. On remarque, en outre, les remparts du moyen âge et la cathédrale gothique, rebâtie de 1490 à 1524. Riez fut, en effet, jusqu'à la Révolution le siège d'un évêché qui datait du V°siècle.

seyne , à 1260 mètres d'altitude, sur un contrefort de la montagne de la Blanche , est une localité d'origine probablement romaine, mais qui passe sans preuves pour avoir été la capitale des Édenates, dont le pays n'est pas même bien déterminé. C'est une ancienne place forte, qui servit notamment de refuge aux protestants et leur fut enlevée par le duc d'Epernon.

valensole , sur un affluent du Verdon, occupe l'emplacement d'une station romaine et devint aussi une place des calvinistes, qui en furent chassés par le duc de la Valette. —

Gréoux, sur le Verdon, possède des sources thermales sulfureuses et chlorurées d'une puissante action recons­tituante; ces eaux étaient connues des Romains, qui les avaient consacrées aux « nymphes de Gréoux », ainsi qu'en témoigne une inscription; elles furent aussi utilisées par les Templiers, dont on voit sur la colline le vaste château ou couvent fortifié en ruines.

II. BARCELONNETTE,

sous-préfecture de 2300 habitants (1), est une jolie petite ville de montagne, bâtie à 1133 mètres d'altitude dans une belle vallée sur la rive droite de l'Ubaye. On y remarque la tour de l'Horloge, du XIII° siècle, surmontée d'une élégante flèche en pierre, et le palais de justice, bel édifice moderne devant lequel s'élève le monu­ment du député Manuel, né au hameau de la Gonchette. Barcelonnette est une bastide au plan régulier, fondée en 1231 par le comte de Pro­vence Raymond-Bérenger, dont la famille était de Barcelone. Place forte de frontière, elle fut vingt fois prise, reprise, saccagée, incendiée, et passa tour à tour des comtes de Provence aux ducs de Savoie et aux Fran­çais, qui en sont restés possesseurs depuis le traité d'Utrecht en 1713. La ville tient d'importants marchés et fabrique des tissus, de même que Jausiers, village d'amont, jadis peuplé de Vaudois.

allos , au-dessus du Verdon, possède une église du XI° siècle, Notre-Dame de Valvert, et des fortifications attribuées aux Romains; à l'ouest, sommeille à 2237 mètres d'altitude, dans une enceinte de rocs, un lac de 5 à 6 kilomètres de tour et de 42 mètres de profondeur; il est sans déversoir apparent, mais on espère l'utiliser pour les irrigations de la Provence.

Au canton du lauzet, le village de Saint-Vincent est flanqué d'un fort qui garde à 1692 mètres d'altitude la vallée de l'Ubaye, tandis que Méolans est situé de telle sorte au pied du mont Siolane, qu'il ne voit pas le soleil durant quatre mois de l'année.

 

(1) Arrondissement de Barcelonnette : 4 cantons, 20 communes, 14.130 habitants.

Cantons et communes principales: 1 . Barcelonnette, 2290 habitants; Condamine, 1250 ; Jausiers, 1760. — 2. Allas, 930. — 3. Lauzet (Le), 650; Méolans, Saint-Vincent. — 4. Saint-Paul, 1060.

 

saint-paul est la commune la plus vaste du département (20554 hec­tares). On y trouve les carrières de beau marbre vert de Maurin, près du col international de Chabrière ou de Lautaret, et l'important fort de Tournoux, juché par 1720 mètres au-dessus du confluent de l'Ubaye et de l'Ubayette, qu'il commande avec la route de Barcelonnette à Coni, tra­versant le col de Larche ou de l'Argentière. Ce col, franchi par François I er en 1515, fut aussi le théâtre de plu­sieurs combats entre Français, Piémontais et Autrichiens.

III. CASTELLANE,

sous-préfecture de moins de 1800 âmes (1), s'é­lève à 723 mè­tres d'altitude sur la rive droite du Verdon, que traverse un pont hardi d'une seule arche. Mais ce qui donne sa phy­sionomie spé­ciale à la petite localité, d'ail­leurs mal bâtie, c'est le rocher qui la domine à pic de 120 mètres de hauteur. Un sentier conduit au sommet de ce roc, que couronne un sanctuaire de la Mère de Dieu, et d'où l'on jouit d'une vue magnifique sur un amphithéâtre de montagnes sauvages. — Appelée Salininum par les Romains, sans doute à cause de ses sources salées, la ville fut dévastée par les Sarrasins au IX° siècle, puis reconstruite sur ledit roc, qui, ayant la forme d'un castellum, donna lieu au nom de Castellana.

 

( 1) Arrondissement de Castellane; 6 cantons, 48 communes, 161.150 habitants. Cantons et communes principales: 1. Castellane, 1780 habitants. — 2, Annot, 102O. — 3. Colmars, 710 . — 4 Entrevaux, 1890. — 5. Saint-André-de-Méouilles, 670 . — 6. Senez, 490.

 

Plus tard, les habitants redescendirent dans la vallée et fondèrent la cité actuelle, qu'ils entourèrent de fortifications dont on voit encore les débris. Castellane, prés duquel on admire les gorges du Verdon, fabrique des lai­nages, des poteries, et fait le commerce de pruneaux, fruits secs et confits, de même que annot, dans la vallée de la Vaïre , aux sites grandioses.

COLMARS , sur le Verdon, entre deux montagnes dont l'une porte un fort, fabrique du drap et fait le commerce de fromages dits de Thorame; on visite aux environs la source intermittente de Fouent-Levant.

entrevaux , sur le Var, est une place forte de deuxième classe, située entre de hautes crêtes que domine un rocher portant des forts. L'église, des XV° et XVI°siècles, servit, comme celle qui l'a précédée, de cathédrale aux évêques de Glandèves, après que cette ville, située à 3 kilomètres nord-ouest, eût été détruite par les Sarrasins et les inondations du Var. En 1536, les Impériaux s'emparèrent d'Entrevaux, qui relevait alors du Piémont; mais les paysans le reprirent quelques années plus tard et le donnèrent à François I er .

senez , sur une branche de l'Asse, était à l'époque gallo-romaine le chef-lieu des Sentii; au IV°siècle, il y fut établi un évêché qui subsista jusqu'à la Révolution. L'ancienne cathédrale romane, bâtie de 1130 à 1242, est de dimensions modestes, mais d'un bon style.

IV. FORCALQUIER,

sous-préfecture de 3000 âmes (1) -, s'élève en amphithéâtre à 550 mètres d'altitude moyenne, sur une colline conique couronnée par la jolie chapelle de Notre-Dame de Provence. Assez mal bâtie, mais possédant une belle église romano-ogivale, cette petite ville est l'antique cité des Memini et fut appelée Forum Neronis par les Romains. Dévastée par les Barbares et les Sarrasins, elle n'était plus au IX°siècle qu'un groupe de quelques maisons bâties à côté d'un four à chaux (furnus calcarius), qui a donné son nom à la localité. Un château y fut élevé au X°siècle, puis une église à laquelle un chapitre fut attaché en 1015; enfin Forcalquier devint en 1054 le siège d'un important comté, démem­bré de la Provence , à laquelle il retourna en 1209. Son canton s'adonne spécialement à l'élevage des vers à soie.

banon , au pied méridional de la montagne de Lure, tisse la laine et fabrique des fromages estimés. — A Simiane se voit un très curieux édifice en rotonde et à double étage, qui est probablement une chapelle XI°siècle construite sur le plan du Saint-Sépulcre de Jérusalem.

Manosque ,

à 3 kilomètres de la Durance , au pied du Mont-d'Or chargé d'oliviers, est la deuxième ville du département par sa population, qui dépasse 5000 âmes, et la première par son industrie, qui comprend notamment des fabriques d'huile estimée, des briqueteries et des tanneries.

 

(1) Arrondissement de forcalquier : 6 cantons, 50 communes, 29070 habitants.

Cantons et communes principales : 1. Forcalquier, 3 020 habitants ; Mane,1100. — 2. Banon. 1040; Simiane, 1000. — 3. M anosque, 5270. — 4. Peyruis, 600; Lurs. — 5. Reillanne1330, Céreste,1050. —6. Saint-Etienne, 830.

 

De plus, elle fait un important trafic des vins, fruits et autres produits de son riche territoire, tels que du lignite, du bitume et du gypse. Mais cette ville est mal percée : la plupart de ses rues semblent n'être qu'une succession de cours, comme dans les anciens villages provençaux; elle est encore renfermée presque entièrement dans la ceinture de ses vieux remparts, dont on remarque surtout la porte de la Louverie. (1) — Manosque, simple mansio ou station militaire sous les Romains, prit peu à peu de l'importance. Au X°siècle, les comtes de Forcalquier y firent construire un château et le donnèrent ensuite avec la ville aux chevaliers hospitaliers de Saint-Jean-de-Jérusalem, qui y conservaient le corps de leur fondateur, le bienheureux Gérard de Martigues.

peyruis et Lurs, sur la Durance , offrent, l'un des restes de trois châ­teaux et de fortifications, l'autre le couvent de Notre-Dame des Anges, lieu de pèlerinage.

reillanne , qui passe pour être l'Alaunia des Romains, conserve des ruines de son château fort et de ses remparts. — Au sud-ouest, Céreste est l'antique station romaine de Catuiaca, dont on voit encore deux ponts et un monument dit Tourré d'Embarbo, pour « la tour Œnobarbus ».

saint-etienne est situé au pied des monts de Lure, dont une gorge possède une chapelle de la sainte Vierge, but d'un pèlerinage fondé en 522 par l'ermite saint Donat, qui a, dit-on, sculpté lui-même la statue vénérée.

(1) Note du rédacteur du site :Peut-être l'auteur veut il parler de la porte « Saunerie ».

V. SISTERON

est une sous-préfecture de 4000 âmes (1) et une place de guerre qui commande un étroit défilé de la Durance confluant avec le Buech. Sise à 580 mètres d'altitude, elle est dominée par une citadelle où fut détenu au XVII° siècle le frère de Ladislas VII, roi de Pologne. Son église Notre-Dame, ancienne cathédrale, est un édifice roman bien con­servé. Au point de vue industriel, on ne peut guère mentionner qu'une filature de cocons et une papeterie.—Sisteron est l'antique cité de Segustero, dont le régime municipal se continua à travers presque tout le moyen âge sans autre modification que celle qu'apportait le changement des mœurs. Elle était alors beaucoup plus peuplée qu'aujourd'hui, et au commence­ment du XIX°siècle elle comptait encore plus du double de sa population actuelle. Cette ville, qui eut beaucoup à souffrir des Barbares, devint au milieu du V°siècle le siège d'un évêché que supprima la Révolution. Les catholiques la prirent en 1562, les protestants cinq ans après, et elle fut démantelée en 1627.

noyers-sur-jabron est dominé par le rocher de Pëirimpi (petra impia), où, suivant la tradition locale, les Sarrasins furent défaits au X° siècle par saint Bevons.

volonne , sur la Durance , possède les ruines d'une ancienne forteresse et une importante fabrique de chaux hydraulique.

 

(1) Arrondissement de sisteron : 5 cantons, 49 communes, 18450 habitants. Cantons et communes principales : 1. Sisteron, 3910 habitants. — 2. Motte (La), 650. —> 3. Noyers-sur-Jabron, 800. — 4. Turriers, 440. — 3. Volonne, 880.

Texte numérisé par Jean-Paul Audibert

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