Chaudon : l'expérience du plateau
En quittant Digne par la nationale 85 qui mène à Nice, on croise le joli petit village de CHAUDON-NORANTE où d'agréables près grimpent jusqu'au pied des maisons. Son aspect de ruralité et de simplicité conservé, ses nombreux lavoirs et son environnement de montagnes évoquent irrésistiblement l'intemporalité de la Haute Provence. Mais c'est en quittant le village par un étroit col de montagnes qu'on arrive après plusieurs kilomètres de route étroite parfois taillée dans le rocher au hameau de Chaudon.
C'est ici qu'en 1940 plusieurs familles d'ouvriers travaillent à la construction de la route Napoléon. Dans cette Haute Provence belle mais âpre, l'arrivée de la guerre stoppe immédiatement tous les travaux. Pour survivre plusieurs familles (Pascottini, Desordi, etc.) se tournent spontanément vers la terre. Du jour au lendemain, ils s'improvisent paysans cultivant pois chiches, épeautre, élevant un cochon et quelques chèvres.
Des gestes à apprendre et à vivre, une mini société loin de tout où de simples « baraques » en bois construites pour le chantier servent d'habitation pendant 5 ans et une école éduquera les enfants.
Habitations de fortune-les baraques (au centre, la mère de l'auteur). Travail agricole (Joseph Pascottini)
Cette expérience sociétale, née de la nécessité et de la réactivité par rapport aux évènements de guerre, est un témoignage de vie qui mérite d'être conservé. Si notre époque fait appel à toutes sortes de protections sociales, ici rien de tel ! L'adaptation devient simplement vitale. C'est que nous sommes sur un plateau dur à vivre, loin de tout.
Mais, il a aussi un aspect magique : adossé à une barre rocheuse, face à la montagne alpine, il est à deux pas des étoiles : c'est la Haute Provence qui sait partager avec ses habitants son modèle fait de discrétion et de courage.
Robert Sausse