La Tour de Porcheres  :

On sait qu'en Haute Provence, tout est subtil : loin du clinquant et de la mise en scène, la vérité du pays n'apparaît que par sa fréquentation fidèle, l'adaptation à son rythme et une attention à tous ses éléments.

 

Ses édifices romans, prieurés ou chapelle, sont d'une beauté élégante et d'une extrême simplicité. C'est l'utilisation de la pierre, l'équilibre des masses et des appareillages qui en dégage toute la sérénité. Mais à côté de ces monuments religieux, il est des monuments plus modestes qui n'attirent guère l'attention.

Parmi eux, non loin de Saint Michel l'Observatoire, se dresse la « tour » de PORCHERES. Il s'agit d'une haute construction rectangulaire ne comportant que de rares ouvertures et directement construite sur le rocher dans un bel appareillage de pierre locale. Il faut dire que le site de Porchères fut, dès l'antiquité, exploité pour ses pierres et les carrières se découvrent sur plusieurs hectares.

Une belle porte en arc brisé entourée de grands claveaux donne beaucoup de grâce à cet ensemble à l'architecture austère. Au milieu de ces murs puissants, les ouvertures sont minuscules et ne ressemblent pas à des meurtrières. L'intérieur comporte deux niveaux voûtés, le niveau du bas ayant été aménagé en chapelle par Léon de Berluc Perussis qui s'y fit inhumer non loin de son château du plan de Porchères. Mais toutes ces inscriptions attirent notre curiosité, un questionnement sur la destination de cet ouvrage, sur sa vocation ?

En parlant de « tour », on pense inévitablement à une tour de guet, à un aménagement militaire. Pourtant, nous avons vu que rien, dans son apparence, ne relève de l'architecture militaire et elle ne marque notamment aucune limite médiévale dans cette Haute Provence morcelée en petites unités militaro-géographique. Henri Paul Eydoux qui a passionnément fréquenté les monuments méconnus nous propose une solution : il s'agirait tout simplement d'une grange médiévale ! ( 1 ) Nous ne pouvons oublier que la vocation économique de la Haute Provence est une vocation agricole. Ici, nous sommes dans une zone d'élevage. Pierre Martel nous apprend que l'origine du nom vient des « porchères » c'est-à-dire des enclos en pierres sèches servant à élever des porcs. Il a estimé leur nombre à 400 enclos. La grange pouvait donc servir d'entrepôt pour les activités liées à cette production.

 

En Haute Provence, les émotions naissent de l'accord de l'homme avec le monde qui l'entoure. Un simple édifice utilitaire de la vie quotidienne laborieuse, à l'écart des sentiers battus, au milieu des champs de thyms, participe à notre géographie des bonheurs possibles.

Robert Sausse

 

Bibliographie  : Henri Paul Eydoux, « Monuments Méconnus », L.A.P.1980.

( 1 ) Raymond Collier (archiviste du département et historien) dit le contraire dans son livre «  La Haute Provence Monumentale et Artistique ». Il estime qu'elle faisait partie d'un système défensif englobant Reillanne, Céreste, Lincel, Saint Michel et Mane destiné à protéger Forcalquier.

- Comme le montre la troisième photos, le lieu servit à héberger les armes provenant des parachutages lors de la seconde guerre mondiale. C'était le poète René Char qui en avait la responsabilité.

La note ainsi que le commentaire concernant une photo sont du rédacteur du site.

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