Digne et la  Révolution de 1789 :
  Digne, avec son maire en tête, le docteur Ricavy, accueillit  les idées nouvelles  apportées de Paris ; à l’annonce de la prise de  la Bastille, avec une grande joie et une grande satisfaction. Mais la ville  demeurait profondément attachée à son roi.
  Tout commença le 22 Mars 1789 par la rédaction  que fit une assemblée; composée de quelques  notables dont le maire, d’un cahier  de doléances comprenant 86  articles pour les Etats Généraux du royaume qui étaient convoqués. 
  
----  Digne vue par Jean Antoine Constantin  Dessin, 1806.
Dans ce cahier l’ensemble de l’arbitraire des droits féodaux  était dénoncés mais on y faisait aussi des demandes : pour faire des  travaux sur le chemin qui menait à l’établissement des bains, et une aide en  argent pour la construction d’ouvrages permettant de mettre la ville à l’abri  des crues de la Bléone. Les Dignois n’eurent aucun représentant du Tiers Etat  d’élu pour aller à Versailles. Ils en furent dépités, seules les sénéchaussées  de Sisteron, et de Forcalquier eurent des délégués, chacune en eu  deux. Le seul qui soutint la ville fut un élu  du clergé, l’abbé Gassendi, arrière petit neveu du grand scientifique, il fit entendre  fortement sa voix. On peut dire que c’est grâce à lui que Digne eut la  préfecture (dès 1790), l’évêché,  un  séminaire, un collège qui devait disparaitre au profit d’une autre ville.  D’ailleurs, la municipalité lui envoya une lettre pour le remercier. Un banquet  fut organisé en son honneur, c’est son père qui le représenta. Gassendi sera un  farouche partisan de la Constitution Civile du Clergé, à cette époque le  département comptait 427 prêtres, 387 prêtèrent le serment civique. A ce  moment, la municipalité vota un déblocage de fonds pour les députés qui étaient  à Versailles. 
  Après la prise de la Bastille, le 26 Juillet, M. Ricavy, le  maire prononça un discours où il renouvelait son sentiment de dévouement total  à Louis XVI. La veille, il avait créé une garde bourgeoise qui était constituée  de 8 compagnies de 60 hommes chacune, l’ancêtre de la Garde Nationale. Devant  la peur qui se manifestait à cause des troubles des arrondissements voisins, il  fit venir 200 hommes du régiment de Bourgogne qui cantonnèrent à l’hôpital.
  L’année1790 vit l’élection d’une nouvelle municipalité qui  va être jacobine, le nouveau maire est l’avocat Faudon. Cette municipalité,  outre de combattre la contre-révolution dut faire baisser le prix du blé, la  faim tenaillait les Dignois, une taxe sur les grains fut supprimée (droit de piquet), elle fut remplacée par  une autre qui ne concernait que les personnes disposant d’un revenu conséquent.  Le maire dut faire vendre le blé 4 livres de moins que ce qu’il avait été acheté  par la municipalité, donc on  assista à  une vente à perte.
  Le maire Faudon, comme président, prit la tête du Directoire  du département (ancêtre du Conseil Général), celui-ci était modéré, dévoué au  roi. A part le premier magistrat de la ville, ses membres n’avaient aucune  expérience des affaires urbaines, ils durent faire appel aux députés des  Basses-Alpes qui eux, étaient des élus de la ville. Le premier problème qui se  présenta à eux se déroula une nuit de Mars 1790 qui vit l’abolition des droits  féodaux mais la loi prévoyait qu’il fallait les racheter. Beaucoup de villages  du département oublièrent ce point qu’il fallut leur rappeler.
  Et qu’en fut-il de l’Eglise ? Avec la Révolution la  plupart des édifices religieux vont devenir des bâtiments publics.
  
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C’est ainsi que le couvent des Visitandines (traverse St.  Jacques) est devenue une gendarmerie,   que le couvent des Trinitaires, au pied de la ville, s’est transformé en  caserne, il en reste la chapelle qui est devenue, de nos jours, l’église du St  Esprit, que le couvent des Cordeliers fut vendu comme bien national, Napoléon  le fera rendre à l’évêché et il deviendra, dans le futur, le collège Maria  Borrely, que le couvent des Ursulines, en 1791,  va servir de lieu de réunion à la Société des  Amis de la Constitution qui représente l’opinion publique de Digne, Société  considérée comme trop tiède par les révolutionnaires  de Manosque et de Forcalquier. L’assemblée  Constituante supprimera les évêchés de Riez, Entrevaux, Sisteron et Sénez.  Quant à l’évêque de Digne, Mouchet de Villeneuve c’était un ecclésiastique qui  refusa d’adhérer aux idées nouvelles, il ne va pas résider dans sa ville de  Digne. Il va prétexter une maladie imaginaire (ou diplomatique) pour ne pas se déplacer et ainsi il ne prononcera  pas le serment civique mais la loi le voulait, donc il va être déchu, remplacé  par quelqu’un de plus révolutionnaire et le 20 Mars1791, le clergé des  Basses-Alpes élisait un nouvel évêque, il s’agit du curé de Valensole :  Jean-Baptiste Romée de Villeneuve. 
  En 1792, les terres et les bâtiments du prévôt de la  cathédrale du Notre Dame du Bourg deviennent biens nationaux, l’achat en est  fait par un lieutenant de gendarmerie, Jean Julien, et par un particulier,  Durand Sauve. Dans ce quartier du Bourg, la cloche de l’église est descendue  car elle est le symbole de la superstition des temps anciens. La Révolution  verra le projet de transformer la cathédrale en bibliothèque publique ce qui ne  se fera jamais. La cathédrale St. Jérôme servira pour la célébration de la  déesse Raison (fin 1793).  
  La municipalité a à nouveau changé. Ricavy est revenu à la  fonction de maire après avoir démissionné à la fin de l’année 1790. Cette  municipalité ne montrera jamais un zèle excessif à faire faire des visites  domiciliaires ce qui lui vaudra un blâme de la part des « Amis de la  Constitution ». 
  En Avril 1794, la ville reçut la visite de Fréron et Barras  (représentants en mission), suite aux troubles déclenchés par les  fédéralistes de Provence. De passage dans notre département, ils se  rendirent à Sisteron où ils ordonnèrent l’arrestation  du commandant des Invalides de la forteresse,  Beraud, pour trahison, deux de ses lieutenants témoignèrent de son attachement pour  l’armée royaliste de Coblentz, il leur aurait conseillés d’y envoyer leur fils. 
  Quelques information  en vrac concernant cette fin de siècle tourmenté.  
  - L’alarme fut grande à travers la ville, en 1792,  lorsque les gens crurent que les troupes  piémontaises envahissaient la Provence. Mais tout rentra dans l’ordre lorsqu’on  s’aperçut que ce n’était que des heurts de patrouilles. 
  - Le collège (Gassendi) fut fermé durant toute la Révolution  et le bâtiment qu’il occupait fut vendu comme bien national. En 1796, les  locaux qu’il utilisait furent transformés en fabrique de savons.  Mais déjà en 1793, Digne faillit perdre le  concept de lieu du département consacré à l’enseignement au profit de Manosque. 
  - La ville comme le département prit partie contre les  Montagnards en faveur des Girondins.
- Les Dignois félicitèrent le gouvernement pour la reprise  de Toulon, ils envoyèrent, même, un excellent patriote à Paris, Roustan ainé,  porter leurs salutation  à la Convention.
Toulon est le symbole de l’arrivé sur la scène politique de Napoléon, mais ceci est une autre histoire.
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