Epiphanie et Chandeleur
En poursuivant la revue des fêtes calendales, après Noël nous en trouvons deux autres qui illustrent le fait que le début d’année est riche en festivité. Le souvenir des rites païens mélangés à la culture chrétienne est bien là quoique de nos jours, ce souvenir ne soit plus, et de plus en plus, qu’une affaire culinaire (galettes et crêpes).
Epiphanie :
-Cette fête religieuse se place le 6 janvier, elle célèbre la visite et l’adoration de l’enfant Jésus par les Rois Mages. Elle se déroule 12 jours après Noël. Autrefois ce moment était observé avec attention par les paysans, il devait prédire le temps qu’il allait faire durant les 12 mois de l’année. 12 jours = 12 mois.
-Ces Rois Mages seraient les descendants des mages perses ou mèdes, très réputés pour leurs connaissances en astronomie et en astrologie ; ils n’auraient eu le titre de rois que grâce à Tertullien au II° siècle, ils représenteraient, aux dires de certains, le monde païen qui reçoit la révélation de la venue du fils de Dieu. Ce fut un autre « père de l’Eglise », Origène, qui en fixa le nombre à trois : Gaspard, qui apporta l’encens, représentant la divinité de Jésus, Melchior amena de l’or (Jésus et sa famille auraient dus être riche, ors, bizarrement, ils restèrent pauvres) symbole de la royauté (royaume de Dieu), Balthazar offrit de la myrrhe pour rappeler que Jésus est un homme donc mortel. Ces noms apparaissent pour la première fois dans son œuvre : « Excerpta Latina Barbari ». La tradition, toujours elle, voulait qu’ils soient arrivés à la crèche guidés par une étoile plus brillante que les autres (en fait Vénus), c’était l’étoile du berger.
-Le mot « épiphanie » est d’origine grec, il signifie « apparition », il se veut évoquer les Epiphanes qui sont des divinités qui se montrent aux hommes. Cette fête, comme beaucoup d’autres, est d’origine païenne, elle sanctifie la lumière parce que les jours commencent de rallonger ; les Anciens fêtaient cet évènement ; à cette date, les Romains célébraient les « Saturnales », journée où le maitre devenait esclave de ses esclaves et où l’esclave jouait au maitre. Ce jour là, les soldats tiraient au sort parmi les condamnés à mort celui qui allait devenir le roi d’un jour puis l’exécutait.
-Cette journée s’appelle « le jour des rois » depuis le XIX°s. , mais cette fête est célébrée par l’Eglise depuis le XII°s. En Provence, l’Epiphanie est l’occasion de déguster une galette, gâteau brioché en forme de couronne recouvert de sucre granité qui a, par-dessus, des fruits confits (pour la partie nord de la France, au-dessus de la Loire, on va trouver une galette fourrée de frangipane sans rien dessus), le tout arrosé d’eau de fleur d’oranger. Dissimulé dans ce gâteau, il y a une fève, à l’origine c’était une véritable fève, l’aliment que l’on connait, ce n’est qu’au XVIII°s. qu’on la voit apparaitre en porcelaine, la tradition ancienne et même celle d’aujourd’hui veut que celui qui la trouve dans sa part offre la prochaine galette. En plus de cette fève, se trouve ce que l’on nomme le sujet, en forme de santon ; celui qui le trouve doit offrir la boisson. Le fait de manger une galette lors de cette journée remonterait au Moyen Age, au XIII°s. ou au XIV°s. Pour en finir avec cette galette, il faut dire que la coutume, encore elle, veut que la distribution des parts soit faite par le plus jeune, un enfant, caché sous la table afin de ne rien voir de ce qu’il attribue à chacun.
-A Larches (Alpes de Haute Provence), on racontait aux enfants que les Rois Mages passaient par le village en allant à Bethléem. Ils les attendaient, dehors, au froid, puis ils rentraient chez eux, déçus, l’âme remplie de déconvenue. Pour les consoler, ils y trouvaient des friandises souvent c’était une tarte aux pommes dans laquelle ils découvraient un petit santon de porcelaine.
Chandeleur :
-Fête qui se célèbre le 2 février soit 40 jours après Noël. Elle se veut être un rappel de la présentation au Temple de Jésus et de la purification de la Vierge Marie (une femme qui naissance à un garçon est considérée comme impure durant sept jours) Lévitique, XII :
« Et lorsque furent accomplis les jours pour leur purification, selon la Loi de Moïse, ils l'emmenèrent à Jérusalem pour le présenter au Seigneur. » Evangile selon St. Luc II, 22
-L’origine date du V°s. (472), elle fut instaurée par le pape Gélase I qui la substitua à une fête païenne. Elle donnait lieu à une procession du Forum à la basilique Sainte Marie Majeure qui se faisait aves des chandelles allumées. Elles étaient bénies et au Moyen Age les gens s’en procuraient car elles étaient censées éloigner le diable. Habitude qui reste présente en Provence et qui veut que l’on fasse bénir une chandelle et qu’on la rapporte allumée au logis si elle s’éteint en arrivant ou en route c’est le signe annonciateur d’une très mauvaise année. Les mariés, le soir de leurs épousailles devait en allumer une pour garantir leur futur bonheur.
Un grand nombre de dévotes provençales de nos jours, ont un grand soin de ne pas négliger de faire « la croix de fumée » dans leur habitation, le jour de la Chandeleur … Pour cela, elles vont entendre la messe et font bénir deux cierges, l’un, assez gros, qu’elles suspendront au chevet de leur lit et qui servira à préserver du tonnerre les jours d’orage, en étant pieusement allumé pendant tout le temps que durera le danger, l’autre petit, simple chandelle de cire, est destiné à être consumé le jour même de la Chandeleur.
Jadis, ce petit cierge était allumé dans l’église au feu bénit, et était porté, ainsi enflammé jusqu’à la maison…
Bérenger Feraud « Survivances »
-En Haute Provence, la coutume voulait que l’on remplisse d’huile des coquilles d’escargots, une fois allumées, elles étaient placées sur les cours d’eau pour apporter la bonne nouvelle de la venue du Christ parmi les hommes aux villages voisins.
-De nos jours, il ne reste plus comme traditions, que celle de défaire la crèche ce jour là et de faire des crêpes. Le principal ingrédient en est le blé, il commence de pousser, on peut puiser dans les dans les réserves faite avec la récolte de l’an passé. Dans notre région, le blé peut être remplacé par du Petit Epeautre. A l’origine, la forme ronde des crêpes rappellent la rondeur du Soleil (Mithra chez les Romains).
On peut les associer aussi aux galettes rondes que ce pape Gélase I distribuait aux pèlerins venus à Rome.
-Ces crêpes vont être faites avec une pièce d’or dans la main gauche tandis que la droite va être occupée à les faire sauter dans la poêle. La première est envoyée au dessus d’une armoire du logis et va recevoir le louis d’or en son centre ; celui de l’an passé va être donné à un pauvre. La nouvelle sera laissée au sommet du meuble tandis que celle de l’an passé sera jetée.
-Comme toute fête, celle-ci donne lieu à la création de nombreux dictons. On va voir, à travers eux, qu’un animal a beaucoup d’importance : l’ours car il va prédire le temps. La Chandeleur est le moment où il sort d’hibernation. Soit il sort de sa tanière, soit après être sorti, il re-rentre pour la poursuivre en attendant un temps plus clément.
DICTONS : Si le temps est couvert le beau temps arrivera vite, s’il fait soleil, l’ours lève sa patte mais voyant l’ombre de celle-ci, il rentre dans sa tanière pour quarante jours de mauvais temps (Mallemoisson, Alpes de Haute Provence).
Si à la Chandeleur, l’ours peut faire sécher sa paille, il fera mauvais pendant quarante jours. (Lincel, Alpes de Haute Provence).
-Comme on a pu le voir, tout fait référence à la fin de l’hiver et à l’arrivée du printemps. Cette fête est celle des beaux jours.