Lurs :
Le village domine à 628 mètres d'altitude la vallée de la Durance et le plateau de Valensole, sur son autre coté, on découvre les pré-Alpes et la montagne de Lure. Il est classé « site naturel inscrit », titre qui désigne les lieux qui ont un grand intérêt de par leurs paysages. La réputation de son huile d'olive n'est plus à faire, Lurs a une des cinq plus belles oliveraies de Provence.
A l'entrée du village, on admira la chapelle St Michel, bâtie en 1621, sur des soubassements du XII ° s., la veille de la fête du lieu, la coutume voulait qu'on y alluma un feu, St Michel étant le deuxième patron du bourg. Le cimetière y fut transféré en 1856, auparavant il était, comme partout ailleurs, derrière l'église.
Son nom latin est Luria ou Lurium. Il viendrait de la proximité de la montagne de Lure. Mais l'antiquité du site, au-delà du Moyen Age ou de l'empire romain, a été prouvé et démontré par des fouilles effectuées en 1914 qui ont fait apparaître des vestiges néolithiques. Avant la période Gallo-romaine, la peuplade qui habitait la région était celle des Cavares, certains historiens font remonter au nom de ce peuple le terme de GAVOTS. A la chute de l'empire romain, aux temps des Grandes Invasions, les Wisigoths dévastèrent la région mais n'allèrent pas jusqu'à Lurs. Et puis vint le personnage qui va influer sur l'histoire du village, je veux parler de Charlemagne. Il va en faire donation à l'église de Sisteron. D'après Honoré Bouche qui écrivit au XVII °s. une histoire de la Provence, il s'y serait rendu lui-même pour l'élever au titre de principauté (qui durera jusqu'au XV° s.) ; l'évêque de Sisteron sera effectivement « prince de Lurs ». Il en fera sa résidence d'été. Mais on a aussi une trace écrite de 967 qui indique la donation que fit Conrad, à la tête de Saint Empire Romain Germanique, à Ours évêque de Siteron et en 1251, l'évêque sera confirmé dans sa possession de Lurs. En théorie, ce territoire dépendait du Saint Empire Romain Germanique (jusqu ‘en 1562), successeur de l'empire de Charlemagne en fait, il était indépendant. Dans son écusson, on retrouve cette appartenance avec l'aigle à deux têtes, aux ailes repliées et le lion doré renvoie à Guillaume Leydet dont il sera question un peu plus bas. Ce blason se voit, aujourd'hui, au dessus de la porte principale de la Mairie, sur le monument aux morts et en haut du portail, qui est l'entrée du vieux village et devait être la porte principale percée dans le rempart. Quant à sa devise, elle dit « LUS, LUSE = il faut que Lurs luise.
Lurs fut attaqué par les Sarrasins en 973 qui furent mis en déroute par Guillaume Leydet dont je parle deux lignes plus haut, lequel fit vœu de bâtir une église s'il sortait vainqueur du combat, ce qui fut fait. Cette église reçut en 1150 ou en 1170, une relique de la Vraie Croix, cette relique fut d'abord entreposée dans la chapelle du château, une légende raconte qu'elle fut conservée dans un reliquaire d'argent qui fut caché, à la Révolution, de nombreuses années après, un berger aperçut une lumière scintillante au dessus d'un buisson près du pont romain de Ganagobie, c'était elle. Elle lui donna son nom : Notre Dame de la Sainte Croix. Elle a subi de nombreuses restaurations mais son origine remonte au X° s., celle que l'on peut voir aujourd'hui est construite sur les ruines de la chapelle de Guillaume Leydet et daterait des dernières modifications faites en 1750 qui virent entre autres l'adjonction de chapelles latérales quoiqu'une partie de son architecture soit antérieure, par exemple son portail qui date du XV ° s. Son officiant, son curé, se nomma vicaire perpétuel jusqu'en 1804, c'était à l'origine, un chanoine de la cathédrale de Sisteron. Cette église possède un clocher en forme de peigne qui reçoit trois cloches, la plus grosse s'appelant Maria Sauvaterra et pesant 419 kgr. Elle fut vidée de tous ses biens à la Révolution.
En poursuivant son chemin à travers les rues bordées de maisons anciennes magnifiquement restaurées, on débouche, au sommet du village, sur une placette qui offre à la vue le château. Il est du X ° s. et vers 1110 Alix de Forcalquier en céda la moitié aux évêques de Sisteron. Durant les Guerres de Religion, il fut assiégé trois fois. Puis vint la Révolution, à ce moment, il fut transformé en petits appartements puis un entrepreneur l'acquit pour le démolir, mais il ne put en venir à bout, il arriva juste à modifier complètement son aspect premier.
En continuant sa promenade, on va arriver au coté opposé à celui qui domine la Durance et au bout d'un chemin (promenade des évêques), jalonné de 15 oratoires mis là en 1864, on va découvrir une chapelle : Notre Dame de Vie (1552) qui souffrit beaucoup des Guerres de Religion et dut être rebâtie en 1662. Avec son portique à colonnes qui ne date que du XIX ° s., on dirait un temple romain. Elle renferme une statue de la vierge, un fusil disloqué qui est à l'origine d'une légende racontant qu'un chasseur tirant sur un lapin vit son fusil lui éclater au visage, invoquant la vierge, il n'eut aucun mal. On y vient en pèlerinage le 15 août.
En allant vers elle, on est passé devant un petit théâtre de forme semi circulaire en plein air. Et…non, il n'est pas antique ! Il a été construit en 1960 sur des ruines de maisons anciennes, il est adossé à une chapelle dont il ne reste rien sauf un encadrement de porte. C'était la chapelle où se réunissaient les Pénitents de Lurs jusqu'à la Révolution, elle fut détruitre durant ces jours troubles.
Et ne pas oublier de voir, à l'entrée du village, coté Durance, un immeuble massif qui en fait a été un séminaire (St. Charles Borromée) qui fut fondé en 1680 par l'évêque Louis de Thomassin. Il connut un grand succès. Cet établissement fut un temps implanté à Manosque puis revint à Lurs en 1736. Entre temps, il servit pour loger la suite nombreuse d'un évêque. Ce bâtiment après avoir été la propriété de diverses familles du bourg, vint en la possession de la compagnie Shell, ce fut aussi un hôtel restaurant de luxe et maintenant il fait « chambres d'hôtes ».
Trois autres petites informations pour clore ce chapitre sur Lurs :
1- Le village possède une crèche dont les santons au nombre de 17, sont classés aux Monuments Historiques, ils datent de la fin du XIX ° s.
2- L'évêque de Digne, Mgr Miollis qui servit de modèle à Victor Hugo pour la figure de Mgr Myriel, celui qui ne dénonça pas J. Valjean, fit une visite pastorale à Lurs en 1807.
3- Fin août, les amateurs comme les professionnels d'art graphique se retrouvent dans ce village pour y tenir des rencontres dont Maximilien Vox fut à l'origine.
L'auteur du site sur "le banc des fénéants"